Un Ange passe.

Ange ou démon ? Je n'en sais rien.
Rien, sinon ses ailes blafardes.
Rien, sinon nos regards qui formaient un lien
Inde scriptible.

Un Ange passe.

Au-dessus des toits de Tokyo,
Il fait glisser ses plumes comme l'eau
D'un ruisseau.
Au-dessus des gratte-ciels grisés,
Il apporte sa pâleur épurée
Aux esprits perdus dans les cités
Et aux âmes qui y erraient.

Une chaleur monte en moi.
Qu'est-ce donc ? Je frissonne...
- Pourtant, pas de froid -
Peut-être d'émoi. Une cloche sonne

Dans ma tête. Pour m'ouvrir à l'espoir
Ou pour fermer les portes que je peux voir.
Son sourire tendre cache peut-être des dents
Qui veulent m'assassiner précipitamment.

Sur les routes de France et d'Europe,
On croise de tout et on perd ce qu'on a ;
On croit ouvrir une bonne enveloppe...
Mais on nous dit de reculer à dix pas.

Un Ange passe.

Alors, je vois :
Les villes s'éclairer,
Les visages s'allumer
(comme des ampoules),
Les rideaux de soie,
Les sourires qu'on refoule.

Alors je vois
La Mer Noire,
Les volcans colériques,
Les guerres, le désespoir
Et les contrées faméliques.

Ah, j'ai pu en voir, des choses. Une seconde
Représente à la fois peu et beaucoup ;
Le monde était comme une eau, j'y voyais les ondes.
Dans son regard, j'ai su qu'il était devenu fou.

J'ai cligné des yeux.
L'Ange est parti, retourné dans les cieux.

Alors j'ai continué,
Préférant cacher mes secrets.
Je suis devenu le porteur du message
Que ma rencontre inopinée porte à travers les âges.