Ma vie, une vie de travailleur,
Des années, de longues années de dur labeur
Une vie d'ouvrier, celle d'un obscur travailleur
Manuel de mon état, comme outils des mains
Des mains usées et fatiguées tous les matins.
Chaque jour, je quitte mon logis, il fait noir
Une journée de bruit et de sueur jusqu'au soir
Des cadences infernales pour un salaire si bas
Je compare cette vie de misère à celle d'un rat.
Aucun espoir de s'en sortir, de réussir
A quoi sert de vivre, de lutter, l'avenir
Quel avenir, celui du pauvre que je suis
Le spectre du malheur, de la mort me poursuit.
Les gueules noires,
Une campagne aux mornes plaines, que l'on appelle le Nord
Terrils pour cathédrales, chevalets pour beffrois
Le pays des gueules noires a l'odeur de la mort
Le peuple des ténèbres souffre de la faim et du froid.
Chaque matin, la terre avale ces malheureux
L'échine pliée, cassée par un travail de bête
Un salaire de misère pour nourrir des ventres creux
Vivre ou crever, leur vie n'a pas le goût de fête.
Des mains de forçats pour extraire l'or des enfers
Des regards hagards, du charbon pour tout horizon
Peur du grisou dans les profondeurs de la terre
Les mineurs, des hommes, les travailleurs des bas fonds.
L'usine,
Cheminées crevant l'épaisse voûte des nuages gris
Les murs de brique ont sur la peau, la couleur noire
De la misère, des mains fébriles tracent graffitis
Et slogans syndicaux, telles des voleuses chaque soir.
L'usine avale la multitude des travailleurs
Dans son ventre, le bruit des machines tonne dans la nuit
La cadence infernale sue et transpire l'odeur
Des heures de fatigue et les plaintes meurent sous la pluie.
Elle ouvre sa gueule béante au jour qui s'est levé
Evacuant son urine d'hommes sur les pavés
Ils retournent la tête basse, les épaules enfoncées
Dans leur détresse s'égaillant dans leur triste cité.
L'ouvrier !
Travailleur de ton état, tu es bon manuel
Fier d'aller œuvrer et accomplir ta tâche
En retour, toucher un salaire mensuel
Et la prime, là, tu te lisses la moustache.
Tu aimes ta femme et surtout tes trois enfants
Ils sont tout pour toi, tu ne comptes pas tes heures
Bosser pour un patron, ce n'est pas triomphant
Mais au moins tu as un boulot, t'es pas chômeur.
Tu pars tôt le matin, ton pas est lourd, pressé
Faut pas de retard, sinon tu es à l'amende
Payé au rendement, tu ne peux baisser
La cadence, il faut respecter les commandes.
Le soir, tu quittes d'un pas las et fatigué
Ton atelier, tout le jour, tu as sué
A fabriquer des pièces, ce n'est pas gai
Ton boulot, mais au fond, tu es habitué.
Avant de rentrer chez toi, tu vois les copains
Au café du coin, à boire ton coup, heureux
A taper le carton, tu n'es pas un rupin
Pour tes amis, tu es un pote chaleureux !
Retour à la maison, tu t'assis près du feu
A réchauffer tes mains, attendant le repas
Ton épouse a préparé un bon pot-au-feu
Et tes gamins te disent bonne nuit Papa !
Je crève !
Je crève ! A me lever pour aller au travail
A voir les collègues, les mêmes retrouvailles
Un boulot de merde, un salaire dérisoire
Un bourrin exploité, l'avenir illusoire !
Je crève ! A penser que j'en ai pris pour vingt ans
Des années de crédit sur le dos, pas brillant
Cet objectif pour ne pas rester locataire
Faut se saigner pour devenir propriétaire !
Je crève ! A vouloir à tout prix avoir des gosses
Les élever, pour çà, pas de secret, je bosse
Ce n'est pas aisé les enfants, ils sont exigeants
Faut pas céder, quelquefois être intransigeant !
Je crève ! A devoir toujours être le meilleur
A montrer, à prouver que je suis un gagneur
Dans ce bas monde on n'aime pas les loosers
Pas le choix, tu dois avoir l'âme d'un killer !
Je crève ! A songer posséder le plus possible
A amasser des objets et souvent très horribles
Ai-je besoin d'avoir tant d'envies, de désirs
Je peux me contenter que de simples plaisirs !
Je crève ! A m'imaginer finir à l'hospice
Vieux, grabataire dans un lit, quel supplice
C'est çà la vie ! Lutter pourquoi ? Qu'elle soit brève
Rassurez-vous, ce n'est pas vrai, qu'un mauvais rêve !
Écrit par CRO-MAGNON
Être doué en quelque chose, le talent se travaille mais le génie n'a aucune règle apprise et impose son style.
Catégorie : Amitié
Publié le 13/05/2017
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Une vie, des vies, des valeurs qui aujourd'hui ne sont plus très bien comprises hélas ! Garder l'espoir et continuer d'écrire pour dénoncer ces valeurs trop souvent bafouées, il en restera toujours des traces. J'ai beaucoup aimé ce partage qui correspond à mon ressenti. |
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lefebvre |
Tu célèbres dans cette sélection-ci de tes bons poèmes le travail et surtout les travailleurs, et notamment les ouvriers, qui ont probablement les travaux les plus pénibles à effectuer : bel hommage multiplié ! Mais ce qui n'est pas pénible, c'est le travail de ton écriture : à lire, un plaisir des mots. |
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jacou |
De beaux poèmes pour raconter la dure vie des ouvriers, cette sorte de carcan impossible à briser. Nous avons très heureusement tes récits bien documentés pour faire revivre certaines conditions de travail comme celles des mines par exemple. |
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TANGO |
Merci de ton commentaire Daniel | |
CRO-MAGNON |
Merci Jacou, ce n'est pas un Travail l'écriture mais un plaisir | |
CRO-MAGNON |
Merci Tango, je n'ai jamais été ouvrier mais je leur rend hommage. | |
CRO-MAGNON |
De beaux poèmes relatant une dure réalité | |
roserose |
Merci Roserose | |
CRO-MAGNON |
Je souhaite une bonne santé à tes écrits, tu réalises tellement bien ce travail que tu es plus qu'un ouvrier des mots ! Bravo Cro ! | |
suane |
Merci SUANE, je suis un artisan, un compagnon du devoir, un maçon des mots ! | |
CRO-MAGNON |
L'homme se retrouve asservi pour contenter ses besoins les plus primaires. | |
Weedja |
Exact Weedja ! | |
CRO-MAGNON |
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