Ce que j'ai encore à vous dire (1996)
C'est un poème de
Serge Smulevic (1921-2010)
***
J'avais seize ans
et j'étais insouciant.
Des études très belles
et des amours éternelles
J'ai eu dix-huit ans
un avenir flamboyant
Des zazous plein les avenues...
Zazou..zazou..tiens voilà les Allemands !
Ach...Ach...disaient-ils en rigolant
Cache ! Cache ! hurlaient mes parents.
C' est la guerre
C'est la misère
C'est l'aventure
C'est la capture
C'est Drancy
C'est fini !
J'ai eu vingt-deux ans
J'ai perdu mes amis
J'ai perdu la belle vie.
Je suis revenu après deux ans
J'avais cinquante ans
à vingt-quatre ans.
A vingt-sept ans
J'ai recommencé une nouvelle vie
Et repris mes vieilles manies
Avec un nouvel amour
Cette fois pour toujours
J'ai raconté à mes deux filles
le triste sort de ma famille
Sans oublier ma pauvre vie
Pendant ces deux années
Que les nazis m'avaient volées
Pendant plus de quarante ans
Je n'ai plus rien dit
Non, ce n'était pas un oubli
Mais je ne peux plus rester indifférent
A ce qui nous vient aujourd'hui
Aujourd'hui
c'est la renaissance du racisme
c'est l'espérance du fascisme
Ils sont de retour, à nouveau
Tous ces anciens fléaux !
Aujourd'hui
J' ai soixante-quinze ans
La colère me retourne les sangs
Aujourd'hui je dois m'exprimer
sans rien vous épargner
J'ai peur que toutes nos souffrances
soient bientôt oubliées
grâce à ce long silence
qu'on vous a si bien inculqué.
Écrit par Isidore2017
«Si demain, tu ne seras pas meilleur qu’aujourd’hui, à quoi te servira demain ?» (Rabbi Na’hm de Breslev)
Catégorie : Triste
Publié le 15/02/2018
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Le mal que l'on nous fait , on peut essayer de le pardonner mais on ne l'oubliera jamais ! Merci Isidor pour ce partage ! Amitiés |
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Yuba |
"J'avais cinquante ans à vingt-quatre ans"... des mots poignants, qui résonnent en moi fortement. Merci Isidore du partage de ce poème magnifique | |
grêle |
On ne voit plus la vie de la même façon quand on passe par ce long couloir du silence...Merci Isidore pour ce beau retour vivant ! | |
suane |
La mémoire de ce qui fut demeure, mais c'est à nous tous de la maintenir, et c'est notre devoir, et l'espoir aussi des anciennes victimes... Le péril renaît, certes, mais "au lieu (site) du péril, croît aussi ce qui sauve" (Friedrich Hölderlin). | |
jacou |
Bonjour Isidore, Choisir de partager avec nous un poème de Serge smulevic, c'est rafraîchir notre mémoire par rapport à un grand homme qui n'avait jamais cessé de dénoncer les atrocités de la guerre et ses horreurs causées et subies! Merci pour ce choix judicieux! |
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Mririda |