Le sol se déchire comme un vieux tapis de nuages.
Je tombe à travers le ciel gris
Le vent, le soleil, sècheront-ils la pluie qui s'échappe de mes yeux ?

Je me réveille encore.
Eternellement je vois ton visage.
Tes grands yeux tristes.
La douleur dissimulée,
Crois-tu vraiment Maman que tu peux me la cacher ?

Toutes ces nuits à essayer d'oublier,
Toutes ces insomnies qui prient l'eau du Léthé.
Mais ce souvenir reste gravé sur la paroi de mes yeux.
Et je cherche les jours heureux.

Ceux où tu souriais en me regardant
Où tu te contentais des mains de tes enfants
Ceux qui ne connaissaient pas l'Etranger.

Mais mon rêve est brisé.
Le plancher de ma vie se craquelle…
L'étranger est entré, il a distillé en toi des senteurs inconnues,
Il t'a tendu un miroir différent
Effacé un peu la dure trace des ans

Il t'a chanté que tu es belle
Il t'a ouvert des horizons
Et caché sous de suaves parfums
Celui de la trahison.

Et tu crois vraiment que je ne vois rien
Que je ne décerne pas ses yeux dans ton sourire,
Moi qui te connais mieux que toi même
Moi, ta fille-mère?

Je suis née dans ta souffrance,
Mais faut-il vraiment que tu renaisses ou t'éteignes dans la mienne ?

Le secret est trop lourd pour mes frêles épaules,
Et je ne puis plus te regarder sans penser
Que ton sang ne te suffit plus
Et que celui à qui tu a promis une alliance éternelle
Ne te trouve plus assez belle.

Ce modèle qui m'a bercé toute mon enfance
Ce modèle de l'amour parfait, de l'union pure,
Disparait de la surface de mes murs.
Je sombre dans l'errance,
Et songe de plus en plus à ces eaux du Léthé.

Pourrais-je te pardonner?