Il jouait de l'accordéon,
Il ne lui restait plus que ça.
Sa vie était une chanson,
Celle qu'il offrait ce soir là.
Il portait toujours des gants bleus,
Pour protéger ses mains du froid ;
Il ravissait les amoureux,
Avec ses morceaux plein de joie.
Je passais là depuis toujours.
Je souriais à ce visage,
Qui répondait par un bonjour,
Et ceci même sous l'orage.
Il était presque devenu
Ami de mon jardin secret.
Il mettait mon image à nu
Je ne pouvais rien cacher.
Sa présence était rassurante,
Lorsque je rentrais aussi tard ;
Sa compagnie accommodante,
Plaisants regards dus au hasard.
Cet homme là était blessé.
Un je-ne-sais-quoi de tragique,
Qui doucement se dégageait,
De sa pétillante musique.
Il regardait les promeneurs,
Souriant aux jeunes et vieux.
Il avait saisi la douleur,
De tous dans ce monde miteux.
Il embellissait nos journées,
Avec son précieux instrument.
Mais savait nous laisser en paix
Vivre notre assombrissement.
Il avait ses accoutumances,
Les mélodies étaient choisies,
Rien n'était coïncidence,
Dans le plaisir de sa survie.

Puis un jour je ne l'ai plus vu
J'ai cherché en vain la musique
Le musicien n'existait plus
Dans la rue devenue statique.
Il jouait de l'accordéon
Ce jour là j'ignorais encore
Qu'il composait son dernier son
Une symphonie de l'aurore.