Les bergers incarnaient une Arcadie fictive
Que Nicolas Poussin peignait, que nos peurs s'avivent
La mort, toujours cachée au profond des tombeaux
Il n'est nul besoin pour la trouver de flambeaux
Mais moi, l'obligé de la vie, qui m'a forgé
Ne lui dois-je pas tirer ses cheveux de jais ?
Combattre à grands fracas les œuvres de sa faux
Puis, me jeter en la mer comme fît Sappho ?
Je n'ai guère intérêt dans l'ouvrage de vivre
Je me laisse épancher, qu'ainsi mon temps soit ivre
Et suis un fleuve arrêté en pleine dérive
Quel heureux sort, si l'on me délivre des rives ?
Le feu crépite et des flammèches s'envolant
Rougeoient aux vitres que le froid gerce, violent
Désir d'immiscer sa complainte en quatre murs
Je m'emmitoufle et me nourrit de mes murmures
Alors, madame la Mort que j'ai invoquée
Laissez-moi dix ans d'âge à parcourir des quais
À monter dans des trains qui ne partent jamais
Mais que tout dise en ce monde que j'ai aimé !
Que vous vous dissimuliez dans des coins obscurs
Vêtant de deuil nos espoirs dont vous n'avez cure !
Laissez-moi aux matins me demander pourquoi
Je suis encore au monde, ça me laisse coi !
Sur mon tombeau, l'on marquera "Je suis le mort"
Mais celle qui me fit est prise de remords
Et, tel Lazare, elle a daigné m'abandonner
Alors rejaillirai-je tel un nouveau-né !
Écrit par jacou
L'art alchimique me tue, me transmute, me sublime. J'en renais plus fort, poétiquement. À suivre.
Catégorie : Pensée
Publié le 30/10/2020
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je n'ai guère intérêt dans l'ouvrage de vivre mais tu donnes aux trains un moyen de survivre |
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justine |
Puissiez-vous vivre heureux, et encore longtemps Jacou ! Vous nous offrez encore des images savoureuses à lire, j'ai particulièrement apprécié la 4ème strophe, Merci à vous |
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Luca |
Magnifique ! Cette poésie où tout devient possible ,en des confidences mélancoliques nous suivons un thème fort en images et palpitant en sensations extrêmes... Bravo Georges pour la sublime poésie et la chute qui chante un univers beau par sa renaissance ! |
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Yuba |
Un poème qui résonne comme une confession, et qui pousse, dans ses questionnements profonds, à s'interroger sur soi-même, sur ce qu'on laissera de soi quand l'heure ultime aura sonné, mais aussi sur le sens de la vie en général. Et quand on a eu la chance d'échapper déjà à la main glacée de la Mort, je pense que cela change la vision qu'on peut avoir de la vie, dans son côté fragile, presque miraculeux, puisqu'à nos dépends on sait qu'elle peut s'arrêter à tout moment. J'aime beaucoup les références bibliques de ce poème, empruntées au Nouveau Testament, avec la figure des bergers et Lazare, ainsi que la référence au peintre Nicolas Poussin. Merci beaucoup pour ce partage riche de sens, mon cher Georges. Avec mon amitié toute vive pour toi :) |
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Matriochka |
Justine, la vie puis la mort sont un train de mesures, comme disent nos gouvernants... Merci. | |
jacou |
Luca, profondément je vous remercie pour votre vœu merveilleux : je vais m'y atteler ! | |
jacou |
Assia, sais-tu : tout, même l'apparent impossible, peut renaître, une fois ?... Merci à toi :) | |
jacou |
Matriochka, la Bible est le livre de chevet de ceux qui espèrent et croient, plus et mieux que Nietzsche, que "ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort". Et Poussin, la démonstration de la mort toujours affleurant dans la vie, toujours cette pierre du scandale présente que le peintre a transformé en memento mori pour les siècles des siècles aux cimaises des temples modernes que sont les musées d'art. Merci. Avec ma grande amitié pour toi :) |
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jacou |
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